Sur le versant argentin des chutes d’Iguaçu, un bac puis un escalier de fortune installé à flanc de rocher permettent d’accéder au sommet plat de l’îlot San Martin dont les contours sont embrassés par une cascade en forme de fer à cheval; de ce point de vue situé à mi-hauteur entre le sommet des cataractes et la rivière Panara en contrebas, le visiteur s’abandonne à la fascination des masses d’eau précipitées entre les rives déchiquetées. Ces trombes produisent en se fracassant sur les rochers soixante-dix mètres plus bas des rafales ascendantes d’embruns et un grondement tel que l’une des cataractes voisines est appelée la Boca del Diablo, la bouche du diable. Tout est vacarme et mouvement, jusqu’au lent tournoiement des rapaces dans le ciel sans nuage. Jamais le regard ne repose jusqu’à ce qu’il rencontre, développé face aux chutes, tandis que le soleil matinal poursuit la trajectoire qui le mène à son zénith, un arc-en-ciel tendu d’une rive à l’autre, impassible dans le tumulte, étalant le spectre translucide de ses couleurs. Surtout, à la différence des arcs-en-ciel fugitifs que l’on peut observer communément après une averse, il persiste et la fascination exercée par le déversement chaotique des chutes se déplace vers cette présence immobile, géométrique, intrigante.