Plus que jamais, il nous semble important de reprendre le débat entre lésion, fonction et symptôme, à la lumière de ce que nous apportent les progrès de l'anatomie, les nouvelles techniques d'investigations neuro-radiologiques et neuro-physiologiques, et l'évolution des approches cliniques ; en choisissant précisément comme objet de convergence de ces savoirs une curieuse région, si protégée du regard des premiers anatomistes qu'il y aura bientôt deux siècles Reil la nomma, après que Vicq d'Azyr l'eût repéré, comme on le fait d'une île. Mais plus le temps passe, à observer et à mesurer, moins se confirme l'isolement de cette zone enfouie. Au contraire, l'insula est au coeur si l'on peut dire, d'une quantité de réseaux fonctionnels, impliqués dans le comportement, la perception de la douleur, le dégoût et l'addiction, le langage et la reconnaissance des expressions des émotions, la régulation des fonctions neuro-végétatives et la pathologie psychiâtrique. Prendre l'insula comme objet, est-ce distinguer artificiellement un territoire cortical qui n'est singulier que par sa situation anatomique, et qui pourrait être morcelé ou dont les frontières pourraient être annexées par les circonvolutions avoisinantes ? Ou bien existe-t-il rééllement une sorte d'autonomie régionale, qui justifie que l'on étudie l'insula à part entière ? Sans préjuger de la conclusion nous pensons que cette démarche permettra de faire l'épreuve de nos méthodes, et le cas échéant, de les faire évoluer. On peut considérer cette entreprise comme un pur exercice de style : il nous parait précisément nécessaire.