VOYAGE
AUX
AMÉRIQUES
un récit hypnotique
par
Benjamin et Benoît KULLMANN
écrit dans un style homérique au sens simpsonien du terme
Les éditions de la Jet.7.com
Chapitre I
MEMOIRES DE PHILLIE
un intense moment d’émotion
Elfreth Alley
Lundi , Benoît travaille avec acharnement , c’est très dur pour lui , aujourd’hui il commence à 17 heures. Nous inaugurons cette journée par la visite du Norman Rockwell Museum , les innombrables couvertures du Saturday Evening Post nous en mettent plein la vue , sans aucun doute cet homme était véritablement un “génie du dessin” dixit Beno-îte. L’aventure continue par une promenade ( l’idée de me couper un doigt pour que la douleur qui en suivra dépasse celle de mes petits petons me traversa l’esprit) , bref , nous passons par la Elfreth’s Alley ce qui nous permis de découvrir l’ utilité du miroir de Franklin , accroché a la fenêtre située au dessus de la porte , il permet de voir qui sonne (chez nous on dépasse la tête et on regarde mais bon chacun son truc).
Le soir , après un cocktail sur le toit du musée Franklin, quatre heures de vidéo sur les “unusual movements disorders “ , terrifiantes, heureusement le vin blanc était potable . Rentrée sur les genoux à point d’heure , ouf Benjamin est toujours de ce monde .
Oui j’ai les pieds bien sur Terre , c’est même incroyable à quel point je les sent. De mon coté , pendant que Benoît se concentre à coups de Chardonnay je décide de faire une ballade (pour changer!) , regrettant de ne pas avoir fait l’ecole du cirque pour apprendre à marcher sur les mains je me dirige vers South street où un énorme hamburger de chez Jon’s s’impatiente de découvrir ma bile Coronalisée. Quelques demoiselles défilent devant le restaurant , j’ en aurais bien invité une à boire un verre si j’avais vu un cul mesurant moins d’ un mètre cube. Mon ventre enfin satisfait je continue ma route , après avoir traversé quelques rues un Black avec une grosse bouche (je sais c’est inutile de le préciser) m’indique un night-club appelé “the fluid” et m’accompagne , nous tombons sur une porte bleue au beau milieu d’un bâtiment fort sale (genre peint avec de la croûte de lépreux) et aucune enseigne n’orne cet endroit. Je dis donc à mon nouveau copain que chez nous , nous marquons en gros le nom des boîtes de nuits et qu’ainsi c’est plus facile à trouver pour ceux qui ne connaissent pas. A l’intérieur les DJ’s et le public remuent leurs têtes par un va-et-vient incessant tels les pigeons de la place Saint-Marc de Venise, la musique et l’ambiance sont bonnes, j’y reste un moment avant de repartir à l’hôtel car je ne veux pas que mon père se fasse un sang d’encre pour moi (je le connais Parker).
zzzzzzzzzzzzzz
Mardi matin , encore un petit déjeuner avec oeufs sur le plat mitonnés par un cuistot afro-américain sorti droit de l’enfer et qui appelle tout le monde Whoozenext . Parmi les détails qui peuvent avoir leur importance, la serveuse a oublié de nous apporter NOS jus d’orange . Passée cette impression pénible d’exclusion, travail pour BK , séances plénières , retrouvailles avec de vieux collègues qui ont l’air d’avoir cent ans . Retour de l’exposition des laboratoires pharmaceutiques avec cinq kilos de stylos à bille et le sentiment coupable d’être une marionnette manipulée par les grandes firmes multinationales . Le spectre de José Bové revient tel le leitmotiv de la symphonie pathétique .
Musée Benjamin Franklin pour Ben, qui gardera secrètes toutes les pensées que lui ont inspiré la proximité spirituelle d’un individu qu’on dit génial mais qui finalement a sans doute simplement eu de la chance , un peu comme un gars perdu dans une ville retrouve son chemin avant tout le monde . (This is complete nonsense). En revanche, nous disposons d’un témoignage indirect sur sa perception de l’existence , sous la forme d’une série de photographies dont le point commun est la recherche du reflet : ça a commencé en fait au Musée Normann Rockwell, où des miroirs tordus nous renvoyaient nos images déformées avec des guibolles immenses et l’impression de marcher à côté de nos pompes . En bougeant à peine , Benjamin raccourcissait de quatre-vingt centimètres, ça me rappelait quand il était petit et si gentil .
La vocation de Binbin reportaire chasseur de reflets s’est confirmée lorsque croisant (cruising en américain ) par l’avenue des Arts il s’est soudain rendu compte que les façades vitrées des buildings se réfléchissaient l’une l’autre dans une vertigineuse cascade miroitante ; lorsque l’on voit le résultat ( cf la petite centaine de photographies de cette période faste de l’artiste première mouture ) de cette réflexion sur la réflexion et son double, Richard Estes n’a qu’à bien se tenir avec ses misérables tentatives hyperréalistes.