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Un fantôme dans le tableau clinique


Un fantôme dans le tableau clinique

Benoît Kullmann, Nîmes, le 18 Juin 2010

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    Permettez-moi de remercier tout particulièrement Pierre Labauge qui me fait le grand honneur de m'inviter pour la seconde fois chez lui, dans la belle ville de Nîmes. Vous imaginez la fierté que l'on peut éprouver, lorsque pour la troisième fois l'on est convié à s'exprimer devant la nouvelle génération des neurologues - Pierre Thomas, auquel me lie l'amitié des compagnons d'armes, fut le premier à me le demander, il y a déjà quatre ans. Je fus très sensible à cette marque d'affection, alors qu'il venait d'accepter la responsabilité du service de Neurologie de Nice. Je traitai, prenant prétexte d'un petit tableau de Franz Van Miéris,  la Visite chez le docteur, de l'au-delà de la frontière qui nous sépare de nos amis psychiatres : l'hystérie. Puis Pierre Labauge me donna l'occasion de parler à Montpellier, à partir d'une Tentation de Saint-Antoine de Brueghel, de la conception de l'hallucination chez Hippolyte Taine. Je croise Pierre Labauge à Lyon il y a quelques semaines, et lui confie deux projets qui me trottent dans la tête. J'aime bien cette histoire de fantôme me dit-il. Va pour le fantôme : qui signifie à la fois, ce que je recherche dans ces tableaux - un personnage, un concept, qu'il faut débusquer derrière les apparences - mais aussi quelque notion qui hante encore notre savoir neurologique bien que la pathologie à laquelle elle se référait ait disparu de notre pratique. À Lyon, il y a un magnifique musée des Beaux-Arts, où je suis tombé nez à nez avec ce portrait. La folle monomane de l'envie.

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Celle qu'on surnommait la hyène de la Salpétrière. Et dans une autre salle, me voici confronté à cette Scène de bataille, dite Charles VIII recevant la couronne de Naples, de Francesco II Bassano  (1549-1592).

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Figurez-vous qu'au musée des Beaux-Arts de Nîmes, vous trouverez cette Suzanne et les vieillards, d'un certain Jacopo Bassano.

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Les Bassano sont une dynastie de peintres, six en trois générations, qui avaient un très prospère atelier en Vénétie. Contemporains du Titien, de Véronèse, du Tintoret. On trouve des Bassano dans tous les musées, tous les palais d'Europe. Au musée des Beaux-Arts de Marseille par exemple, cette Construction de l'Arche de Noé.


Au passage, je vous livre un petit truc : vous voyez ce personnage, penché en avant, de trois quart-arrière : la quasi totalité des oeuvres des Bassano en comportent un. Une sorte de marque de fabrication familiale. J'ai le projet de m'appuyer sur ces deux images, afin de construire un raisonnement sur l'histoire d'une notion dont je ne vous livre pas tout de suite le secret, afin de vous y amener par petites touches, et de vous laisser le plaisir de le deviner.

Monomanie

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    Ce tableau, la folle monomane de l'envie, a une histoire : Théodore Géricault à l'âge de 28 ans achève une oeuvre majeure, interprétation engagée d'une tragédie maritime survenue en 1816, le Radeau de la méduse, qu'il expose au salon de 1819. Qui lui a demandé un travail considérable. Mais la fatigue physique n'est rien, si l'on obtient en retour la reconnaissance de la critique et du public. Ce ne fut malheureusement pas le cas, et l'épuisement se double d'un découragement terrible, que nous appellerions dépression.

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    Géricault consulte Georget, un jeune aliéniste de la Salpétrière qui vient de publier De La folie, considérations sur cette maladie (1820) ; dédicacée à ses deux maîtres, Pinel et Esquirol, les fondateurs de la psychiatrie française. Je pense que vous avez tous vu le tableau édifiant de Tony Robert-Fleury (1837-1911) Le docteur Philippe Pinel délivrant les aliénés à la Salpêtrière en 1795.

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    Georget est l'élève préféré d'Esquirol, qui reconnaît en lui son fils spirituel. Il est également nourri de physiognomonie, laquelle prétend déduire de la morphologie du visage le caractère (vieille pratique, dont le premier traité connu date d'Aristote ou de l'un de ses suiveurs du Lycée). Au XVIIIè siècle, on s'arrache le Traité de Physiognomonie de Lavater, catalogue de silouhettes prototypiques, sorte de manuel que l'on emporte avec soi, et qui vous permet discrètement d'évaluer vos voisins de diligence ou d'auberge : suis-je en compagnie d'un coquin ou d'un homme de bien, d'une dame du monde ou d'une gourgandine. Georget est encore lecteur de Gall : l'inventeur avec Spurzeim de la phrénologie. Laquelle prétend faire au niveau du crâne ce que Lavater propose au niveau du visage : comme on lit le caractère à partir de la forme du front, du nez, de la mâchoire, on déchiffre les fonctions cérébrales en tâtant les bosses du crâne. La question fut posée, de connaître la raison qui fit la fortune de cette théorie. Nous en avions parlé à propos de la crise des représentations de fonctions supérieures : la phrénologie est intrinsèquement matérialiste, substituant aux facultés de l'âme localisées dans des ventricules (la doctrine cellulaire des pères de l'Église) sans lien avec l'anatomie, une conception réaliste, ancrée dans l'observation, et morcellant les facultés supérieures arbitraires, leur substituant des facultés intellectuelles, morales et instinctives dont la liste est établie en fonction de critères objectifs (selon leurs auteurs).

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    Donc Georget nourri de Gall, de Lavater, de Pinel et d'Esquirol, est convaincu que les passions (entendez par ce terme à la résonnance cartésienne : les émotions, les affects d'aujoud'hui) et les idées déterminent les traits des individus. Il conseille à Géricault, préfigurant par là une sorte de thérapie par l'art, de faire le portrait d'une dizaine d'aliénés de la Salpétrière, que le peintre exécutera entre 1821 et 1824. Cinq de ces tableaux ont disparu. Restent la monomane de l'envie que je vous ai montrée ;

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la monomane du jeu, exposée au Louvre ;

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le monomane du vol, à Gand ;

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le monomane du commandement militaire, à Winterthur ;

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le monomane du vol d'enfant, à Springfield dans le Massachussett.

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    Vous voyez comment Géricault inspiré par Georget a inventé, trente ans avant Falret, le Tableau Clinique, cette expression neurologique que nous utilisons quotidiennement. Maintenant réflechissez à ce que nous mettons en jeu lorsque nous regardons un portrait, qui a l'avantage par rapport à un visage que nous évaluons en un coup d'oeil, de ne pas se dérober à notre scrutation. Nous évaluons, comme deux singes se recontrant, deux enfants, ou deux crevettes, l'émotion de l'autre. Lorsque Géricault réalise ses tableaux, Darwin n'est certes pas encore à bord du Beagle, mais une dizaine d'années plus tard il échafaudera une conception du monde qui aboutira, entre autres, à l'écriture du célèbre The expression of the Emotions in Man and Animals publié en 1872. La phrénologie récente, comme la physiognomonie vieille comme le monde, sont des tentatives sommaires certes, mais prémonitoires, de théorisations beaucoup plus solides en attendant les constructions contemporaines des centres de reonnaissance des visages et d'évaluation des valeurs expressives.

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    Le point commun à ces personnages ? Ce sont tous des monomanes. Qu'est-ce que la monomanie ? Un concept utilisé par Esquirol, l'un des pères de la psychiatrie française, un élève de Pinel, et le maître de Georget.

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En 1805, Esquirol a fait paraître Les passions considérées comme cause, symptôme, et moyen de la maladie mentale. Il faut comprendre la portée de ce titre : les passions (la joie, la colère, la tristesse, l'amour, l'envie, la douleur...) sont à la fois la cause des maladies mentales et leurs symptômes : imaginez que vous disiez, les vésicules de l'éruption zostérienne sont à la fois la cause et le symptôme du zona... Quand au moyen, il faut entendre par là ce qui permettra au thérapeuthe d'entreprendre la guérison du malade : en agissant sur les passions, l'on corrigera la maladie mentale. Pinel déjà préconise une action consolatrice - après avoir libéré les fous de leurs chaînes, affirmé qu'il est indigne de les traiter comme des criminels ou des animaux, et qu'on leur doit au nom de leur humanité respect et attention - qui consiste à encourager tout ce qui chez l'aliéné va dans le sens d'un retour au sensé. De même Esquirol, à la nuance près que sa precription n'est plus consolatrice mais perturbatrice - il faut bousculer le symptôme, exercer une certaine contrainte pour remettre l'aliéné sur le chemin de la raison. La raison, ce maître concept à la charnière du siècle des Lumières et de celui du positivisme, entre Kant et Auguste Comte, entre Montesquieu et Hegel, qui n'en a pas fini, deux siècles après Descartes et Pascal, de dialoguer avec les passions - le romantisme en sera l'un des rejetons.
    
    Il y a plus : dans l'édition de 1817 de l'encyclopédie médicale éditée par Pancoucke, l'article Monomanies est rédigé par Esquirol1 : " la monomanie n'est pas seulement une maladie mais est « de toutes les maladies, celle dont l’étude offre le sujet plus large et plus profond pour la méditation : l'étude de celui-ci embrasse ... celle de la civilisation ». Nous soulignons le terme maladie. Les monomanies sont des maladies qui sont l'expression d'un malaise dans la civilisation, pour prendre une expression contemporaine. Ultérieurement Esquirol proposera aux autorités de dresser un tableau exact de l'ensemble des monomanies affectant la population, afin d'établir un bilan de l'état moral de la société.

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    Le terme monomanie trouve sa place dans une constellation conceptuelle, constellations sémantique, hors de laquelle comme un poisson sorti de l'eau il ne saurait survivre : les mots manie, lypémanie, monomanie revêtaient alors une signification dans une configuration particulière, et certains ont disparu, d'autres ont survécu au prix d'une mutation de la signification. La Manie désigne alors un délire généralisé, opposé aux délires partiels : d'un côté la Lypémanie, délire partiel sans limitation d'objet que nous appelerions de nos jours Mélancolie, mais que l'on entendait au temps d'Esquirol comme passion triste. Les autres délires partiels sont les Monomanies, hybrides entre la Manie et la Lypémanie, et qui concernent un seul objet dont on distingue trois variétés : la monomanie intellectuelle, où le délire thématique est au premier plan ; la monomanie affective ou raisonnante, au cours de laquelle le patient peut conserver une certaine conscience du trouble ; la monomanie instinctive, atteignant la volonté, et menant l'aliéné à commettre des actes médico-légaux. Cette dernière catégorie est parfaitement illustrée par le monomane du vol (le Kleptomane) et le monomane du vol d'enfant (le Kidnapper) de Géricault.

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    Le premier concept fantômatique sur lequel je voulais attirer votre attention est donc la Monomanie.



La couronne de Naples

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    Passons maintenant à notre second tableau rencontré au musée des beaux-arts de Lyon : la Scène de bataille, dite Charles VIII recevant la couronne de Naples. Vous voyez ici la couronne, toute petite, que l'on tend à Charles VIII en plein combat. Plus tard, semble répondre le roi à son zélé courtisan. Qu'est-ce que ce tableau peut bien avoir à faire avec la Neurologie ?  Je vais tenter de vous mener à la réponse par étapes, en vous livrant peu à peu des indices. Je suis certain que vous serez nombreux à découvrir la réponse dès les premières diapositives.

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 Quel est le point commun entre ces rois, ces papes, ces écrivains, ces musiciens, ces peintres, ce poète qui écrit les vers

Pourquoi mon cœur bat-il si vite ?
Qu'ai-je donc en moi qui s'agite
Dont je me sens épouvanté ?
Ne frappe-t-on pas à ma porte ?

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et Alphonse Daudet qui dans La doulou page après page exorcise sa souffrance : Quelquefois je me demande si ce n'est pas aux inoculations de Pasteur que je devrais recourir, tellement je sens dans ces douleurs suraiguës, ces torsions, ces secouées furieuses, ces crispations de noyé, une analogie avec l'accès rabique...

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    Et cette galerie de personnages peu recommandables... Le dernier, avec ses petits yeux cruels, c'est Al Capone.

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    Vous y êtes, vous avez identifié ce point commun que partagent tous ces personnages. Une affection qui a frappé la population en général, et pour le particulier, les cours européennes depuis le XVIè siècle, l'intelligentsia française au XIXè siècle, les monstres politiques du XXè, une maladie dont l'onomastique permet de suivre la progression historique rien qu'en dressant le lexique de ses dénominations successives. Le Mal de Naples ou mal napolitain pour les Français est le Mal français pour les Italiens, les Espagnols, les Allemands, et les Anglais ;  le Mal espagnol pour les Portugais et les Néerlandais ; le Mal anglais pour les Écossais ; le Mal allemand pour les Polonais ; le Mal polonais pour les Russes. Vous avez reconnu maintenant depuis un bon moment la syphilis. Pourquoi Naples semble-t-elle le point de départ de la maladie ?

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    Parce que Charles VIII, décidé à faire valoir ses droits sur le royaume de Naples autrefois possession du bon roi René, et perdu par la suite au profit , avait recruté en 1494, à l'occasion de la mort de Ferndinand Ier de Naples, une armée de 30.000 hommes, essentiellement des mercenaires. Parmi eux, quelques-uns de la quarantaine d'hommes d'équipage de la flottille de Colomb, revenu en 1493 des Antilles à bord de la Niña, avec à son bord une dizaine d'autochtones, accompagné de la Pinta commandée par Martin Pinzon qui arrive à Séville fin Mars 1493. Ces quelques marins rapportaient sur le vieux continent un cadeau imprévu, la vérole qu'ils avaient contracté avec les accomodantes (d'après le témoignage de Colomb) femmes du cru. Martin Pinzon fut la première victime officielle de la vérole sur le sol européen. Le siège de Naples dura de Février 1495 à début 1497, un très grand nombre de prostituées furent affectées, sans compter les viols et autres vicissitudes de la promiscuité. Telle est la version "colombienne" de l'infestation syphilitique. Une variante, tout aussi plausible, est que le contingent espagnol dirigé par Gonzalve de Cordoue, venu à la rescousse de Ferdinand II de Naples à la demande de son cousin Ferdinand II d'Aragon, afin de contrer les ambitions de Charles VIII, ait comporté quelques vétérans du voyage de Christophe Colomb. Quoiqu'il en soit, après leur démobilisation en 1497 les mercenaires se répandirent dans l'Europe entière, l'Afrique, le Proche-Orient, l'Asie. A la fin du XVIè siècle, le Japon était atteint, et la maladie stabilisée en France.

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    La première description de la syphilis fut publiée par Girolamo Fracastoro 1530 : son Syphilis sive de morbo gallico fonde la légende du berger Syphilus, construite à partir d'un personnage très secondaire des Métamorphoses d'Ovide. Fracastor invente l'histoire suivante : le berger Syphilus, un jour qu'une chaleur écrasante anéantissait ses troupeaux de boeufs et de brebis, osa insulter le Soleil, et dresser des autels à Alcithoüs, l'un de ses anciens rois. Mais le Soleil aperçoit le crime et

  Versant d'un mal affreux la semence subtile,
Dans les airs attristés de ses rayons blafards,
Il répandit soudain, en fétides brouillards,
Le poison qui germa sur cette terre impie...
Coupable instigateur du forfait qu'elle expie,
Syphilus, le premier, sent naître sur son corps,
Et se multiplier l'ulcère aux larges bords.
Le sommeil fuit sa couche, et d'horribles tortures
De ses membres brisés déchirent les jointures.

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     Le malheureux Syphilus a osé défier un Dieu. Ènième victime de l'hubris (cf Marsyas écorché vif parce qu'il avait prétendu dépasser avec sa flûte les aptitudes musicales du même Apollon), Il est frappé d'un mal horrible autant qu'étrange. Fracastor suggéra que le mal avait pour origine de très petites créatures qui échappaient à la perception des sens et passaient d'un organisme à l'autre.

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    Le montpelliérain Jean Astruc (1684-1766) dans le De morbis venereis (1736) reprend l'hypothèse d'un essaim d'animaux très petits, très agiles, et très féconds. 

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     Je ne prétend pas dans le cadre de cet exposé vous relater l'histoire entière de la syphilis, il nous faudrait la soirée, mais retenez pour l'instant que le Teponème pâle fut découvert à Berlin en 1905 par Fritz Schaudinn et Erich Hoffmann. C'est une Bactérie, de l'ordre des Spirochetaeles, de la famille des Spirochaetaceae, du genre Treponèma.  La première réaction sérologique est mise au point par Wassermann, Neisser et Brück en 1906. Alexander Fleming découvre en 1928 la pénicilline, dont la fabrication industrielle a débuté en 1941 et la production à large échelle en 1944. L'incidence de la syphilis chuta alors de 90% en 5 ans. 

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J'ai lu récemment cet article passionnant : on the Origin of the Treponematoses : a phylogenetic approach, de Harper et al., publié en 2008 dans PlOs. Vous savez qu'il existe d'autres tréponématoses : le Bejel, le Pian, la Pinta, dont la contamination n'est pas vénérienne. Le Béjel provoque des lésions essentiellement cutanées, et concerne des régions chaudes et arides, le Pian provoque des lésions cutanées et osseuses, en particulier chez les enfants, et concerne des régions chaudes et humides. L'unicité des tréponématoses fut établie par Hudson en 1958. Des lésions osseuses de syphilis congénitale ont été relevées sur des squelettes datant d’avant Colomb (G-B, Italie, France), alimentant les théories pré-colombiennes de la maladie. Fllait-il se résigner, en suivant Voltaire :  la vérole est comme les Beaux-Arts, on ignore quel en a été l'inventeur ? Par ailleurs, a été soulevée l'hypothèse d’une mutation du Pian (Yaws) et/ou du Bejel.
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La biologie moléculaire semble apporter des arguments en faveur d’une parenté étroite entre la souche du Nouveau-Monde T. pertenue, qui provoque le pian, et la souche qui provoque la syphilis, T. pallidum. Une mutation ponctuelle sépare les souches du pian et du bejel de l’Ancien-Monde, tandis que trois mutations distinguent les formes de l’ancien et du nouveau monde.

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Monomanie ambitieuse

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    Nous voici maintenant avec deux notions en tête : la monomanie, et la syphilis. Maintenant, figurez-vous, même si cela paraît improbable, que j'ai eu votre âge, et que je travaillais dans un service de Neurologie. Vétuste. Nous avions une annexe, plus vétuste encore, aménagée au dessus de la blanchisserie. Quiconque visitait celle-ci n'avait pas besoin de lire Zola : on dirait que ce tableau de a été commandité par un détracteur de l'hôpital. Cette annexe, du temps que nous n'avions pas d'hôpital de jour, servait à placer des malades en souffrance d'un placement en maison de rééducation ou de convalescence, et à recevoir des patients justifiant d'un traitement par perfusion. Pendant que je vous raconte ma vie, je vous projette ce tableau de Franz Francken, mettant en scène Crésus, cette incarnation de la richesse, exposant sa fortune au philosophe Solon, qui n'en a cure2. Régulièrement, mon patron convoquait  étudiants et internes, dès que s'annonçait un patient singulier. Pour des raisons de confidentialité, je modifierais la plupart des données biographiques de ce personnage. Qui se présentait, avec une solennité et des gestes de grand d'Espagne : Anselmo de Sevilla3, comme l'un d'entre nous s'affublait soudain d'un Tartempion de Nîmes, en insistant sur le de vendu comme particule nobiliaire. Et de s'extasier sur la beauté du lieu : "mais c'est un palais, mais c'est un endroit féérique..." (je remercie au passage Philippe Barrès qui a connu l'individu et dont la mémoire a retenu des détails que mes hippocampes avaient égarés). Mon patron savait y faire et le lançait sur sa progéniture : "mes enfants, merveilleux, ils ont fait des mariages somptueux, leur avenir est assuré, je les ai mis pour toujours à l'abri du besoin." Car ce petit employé d'une fabrique de machines à écrire était à l'en croire un inventeur de génie, et attendait la commercialisation de plusieurs prototypes révolutionnaires dont il avait déposé les brevets... Ses parents étaient admirables, exceptionnels. Et son épouse... un ange de patience, supportant ses innombrables sucès auprès du beau sexe. L'apogée de la présentation, je me la rappelle comme si c'était hier : danseur infatigable et convoité de toutes, il avait fait chavirer dans un tango historique la veuve du général Franco dans les salons de l'Alhambra de Grenade. Perpétuellement enchanté par lui-même, il était intarissable, et totalement imperméable à la signification péjorative des rires, incoercibles, de l'assistance.

    Si l'on s'approchait de lui, de bonne grâce il nous prêtait un oeil, il aurait tendu les deux pour nous faire gagner du temps s'il avait pu, tant il était complaisant. Et nous examinions ses pupilles irrégulières, aréactives à la lumière mais mobiles lors de l'accomodation-convergence. Le signe d'Argyll Robertson - la pupille accommodante mais aréactive, disait-on avec malice - était déjà connu en 1830, décrit par Romberg. C'est une P.G, c'est une P.G, nous répétait notre patron, qui le faisait rentrer régulièrement pour des perfusions de pénicilline. La paralysie générale, P.G. pour les familiers, Maladie de Bayle pour les savants, désigne l'une des manifestations neurologiques de la syphilis tertiaire. Comment Anselmo de Sevilla avait-il attrapé la vérole, nous ne l'évoquions pas.  


 Ce tableau clinique m'était donné comme caractéristique de la paralysie générale, inchangé dans ses grandes lignes depuis la géniale description de Bayle, sur laquelle je vais m'attarder à présent. C'est enfin énoncé la raison d'être de cet exposé, dont je vous rappelle le titre : un fantôme dans le tableau clinique. En effet, qui se souvient de cette maladie qui fut si importante, qu'elle devint une sorte de parangon, de modèle, d'archétype dans plusieurs domaines de la vaste neurologie, présente dans quelques chapitres majeurs de notre discipline telle un auxilliaire pédagogique. Il se peut, pour des raisons historiques, la fréquence de syphlis, très rare en 2000, ayant décuplé à la faveur de la reprise des contaminations par le virus du sida, que vous en ayez vu plus de cas que moi. Mais de mon temps, je veux dire lorsque j'avais votre âge, mes patrons me racontaient cette maladie comme des vétérans évoqueraient le débarquement de Sicile ou la guerre des tranchées : ils en ont entendu parler,  éventuellement ils en ont vu les derniers cas, ils en ont connu les spécialistes indiscutés. Mais eux-mêmes ont si je puis dire vécu les derniers moments de cette affection prédatrice. Personnellement, je n'en ai vu que trois cas dans la forme que je veux développer aujourd'hui, dont le premier me fut présenté par mon maître Barbizet. Cette maladie autrefois si commune m'est plus étrangère que la lèpre, dont j'ai posé le diagnostic en quelques rares occasions.

La paralysie générale, ou maladie de Bayle :

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    Antoine Laurent Jessé Bayle (1799-1858) soutient sa thèse en 1822 à l'âge de vingt-trois ans : les Recherches sur les maladies mentales qui abordent frontalement la question de l'origine anatomique de l'aliénation mentale ; sujet qu'il approfondira dans la Nouvelle doctrine des maladies mentales (Montpellier 1825) ; puis dans le Traité des maladies du cerveau et de ses membranes (Montpellier 1826).  Élève de Broussais, de son oncle Gaspard Laurent Bayle (1774–1816), et de son protecteur Antoine-Athanase Royer-Collard, un rival de Jean-Etienne-Dominique Esquirol, il publie avec la Nouvelle Doctrine des maladies mentales la synthèse de près de deux cents observations d'une maladie associant aliénation mentale et signes physiques, réalisant une entité morbide hybride qu'il dénomme paralysie générale, confrontant description clinique et vérification anatomique.

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    L'examen cadavérique selon l'expression du temps retrouve dans tous les cas un épaississement des méninges : soit par arachnitis latente, intéressant dure-mère et arachnoïde, soit par méningite chronique, intéressant pie-mère et arachnoïde. Presque toujours, phlegmasie chronique des méninges : adhérences, granulations, fausses membranes... plus rarement irritation spécifique ou sympathique du cerveau.

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    La symptomatologie de la méningite chronique est analysée du point de vue évolutif : trois périodes se succèdent, du point de vue de l'altération des facultés mentales Bayle distingue les périodes de monomanie (délire partiel), puis de manie (délire généralisé), puis de démence. On évoque les prémisses de systématisation des délires organisés selon Farlet :  incubation,  systématisation,  stéréotypie.

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    La première période, ou période de monomanie est associée avec des phénomènes physiques : vertiges, étourdissements, perte de connaissance, paralysie locale ou générale ; la monomanie de cette méningite chronique est appelée ambitieuse : les malades imaginent tout d’un coup qu’ils sont riches,  puissants, élevés en dignité, couverts de distinctions et de titres ; (...) ils font des projets gigantesques, (...) ils en parlent sans cesse (...) leur babil est intarissable  (...) ils chantent, rient, sont dans un état d’hilarité et de gaieté remarquable ; les absences sont fréquentes, ainsi que les troubles mnésiques, les embarras de la langue (la future hypoprosodie de Monrad-Krohn, mais aussi et plus tôt la fibrillation de la langue que Charcot désigne dans ses leçons du Mardi comme l'un des signes qui lui font évoquer la parlysie générale ), les difficultés dans la marche, la raideur ;

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    lors de la deuxième période, ou période de manie ( où l'on distingue le premier degré et le deuxième degré, et dans ce dernier, la première variété et la seconde variété ), le délire ambitieux devient plus étendu, plus vaste, plus gigantesque et plus dominant. Dès-lors, les malades se croient au comble de l'opulence et des grandeurs. Ils possèdent des centaines de mille francs, des millions, des milliards, des centaines de milliards, des caisses remplies d'or, des diamants superbes et sans pareils, des habits magnifiques, des châteaux, des villes, des royaumes, ou même l'univers entier, tout leur appartient. Ils sont ministres, généraux, amiraux, princes, rois, empereurs ; ou Dieu même. Ils distribuent de tous côtés des honneurs et des récompenses, et nomment les personnes qui les environnent aux grandes charges de leur royaume ; la troisième période, ou période de démence, est subdivisée en trois degrés, le second était caractérisé par une paralysie incomplète des membres inférieurs, des chutes fréquentes, des troubles sphinctériens. Selon Bayle, cette maladie représente un cinquième des maladies mentales de l’homme, un trentième des maladies mentales de la femme. (En 1877, le directeur d'un asile pour hommes à New York indiquait que dans son institution la paralysie générale représentait plus de douze pour cent des admissions et plus de deux pour cent des décès).

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    Cette description suscite quelques réflexions : la première, qu'il s'agit d'une étonnante relation entre une altération anatomique et un tableau clinique, selon l'expression chère à Jean-Pierre Falret ; nous verrons dans un instant comment cette publication a été reçue. La seconde, à la lumière de ce que nous savons maintenant de la syphilis, et qu'ignorait totalement Bayle, est une question naïve : comment un agent infectieux peut-il provoquer une pathologie mentale délirante si spécifique, une monomanie selon l'expression d'Esquirol, aussi stéréotypée d'un patient à l'autre ? Mais le plus important est ceci : dans le Traité des maladies du cerveau et de ses membranes seules trois observations mentionnent des antécédents syphilitiques !  Comment est on passé d'une conception idiopathique de la paralysie générale, à son étiologie syphilogique, telle est la question que je vais aborder maintenant.

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    Première champ d'investigation : les rapports du cerveau et de la syphilis.

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    À la fin du XVIIIè siècle, en Angleterre, John Hunter écrit : le cerveau est au nombre de ces parties vitales qui peut-être ne sont pas du tout susceptibles de l’action de la syphilis (A Treatise on the Veneral Disease. London 1786.) Et Astley Cooper (1768–1841) enchérit : le cerveau est de ces tissus qui ne paraissent pas susceptibles d’être altérés par l’influence du virus vénérien (1835). En France, Lasègue soutient que l’aliénation syphilitique est simplement conjecturale, possible, présumable, et rien de plus (1861).

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    En cette fin du XIXe siècle l’autorité absolue en matière de vénérologie est Alfred Fournier pour lequel a été créée une chaire de syphilographie ; dans La syphilis du cerveau, parue en 1870, on peut lire " Est-ce que, tout d'abord, les troubles intellectuels relevant dune cause syphilitique comrtent quelque caractère particulier, quelque attribut pathognomonique ou au moins tant soit peu spécial, de nature à révéler leur origine ? Pas le moins du monde. Je vous l'ai déjà dit, et je ne crains pas de vous le répéter encore parce qu'il y a un intérêt majeur à ce que vous le sachiez bien : les troubles intellectuels de la syphilis ne se différencient par aucun signe particulier ? L'incohérence, le délire, la manie, la mélancolie, bref toutes les perturbations mentales de la vérole sont ce que sont l'incohérence, le délire, la manie, la mélancolie, etc., qui dérivent d'autres influences morbides. À n'apprécier qu'en eux-mêmes ces phénomènes de perturbation cérébrale, ils ne se distinguent en rien de ce qu'ils sont ailleurs, de ce qu'ils sont dans des circonstances étiologiques absolument étrangères à la syphilis.

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Syphilis et paralysie générale

    Quel est cet intérêt majeur ? Dans quelle concurrence se trouve placée la vérole, que celui-là même qui a identifié l'origine syphilitique du tabès - pressentie par Duchenne de Boulogne - ne veuille pas entendre parler d'une origine syphilitique de la paralysie générale ? C'est tout l'intérêt de l'étude de ce concept défunt, autour duquel gravitèrent tous les champs de force idéologiques de la neurologie en préformation. Certes, pour Fournier, la paralysie générale existe. La syphilis n’est pas une cause de paralysie générale, mais peut, exceptionnellement, la mimer : c'est la pseudo-paralysie générale, auquelle une littérature spéciale sera consacrée4. Fournier convoque à la rescousse « le Docteur Wille, dont chacun connaît les remarquables travaux, (qui) a insisté de même pour signaler chez les syphilitiques l’absence habituelle du délire ambitieux ». Nous voici  bien, nous qui faisions confiance tant à Bayle qu'à nos Maîtres, lorsqu'ils nous soutenaient que ce fameux délire, si particulier, reconnaissable entre tous, caractérisait la paralysie générale autrement dite syphilis tertiaire cérébrale  ! Ce tableau clinique, si précis et invariable, n'était-il qu'une vue de l'esprit, une légende ? À ce propos, ma mère m'avait raconté l'histoire d'un général héros de la grande guerre qui frappé par cette maladie était rentré à cheval dans une église, tel un chevalier de Malte jouissant de son privilège. Ma mère attribuait à l'incapacité de ce membre éminent de l'état-major de l'armée française censé élaborer la défense de notre pays la débâcle de 1940. Si j'ai retrouvé une trace de la maladie de ce général, en revanche nulle mention de l'histoire du cheval. D'un cheval il est question dans la biographie d'un autre syphilitique célèvre, Nietzsche. Sortant d'un café de Turin, voyant un maître rosser sa monture, le philosophe aurait poussé un hurlement, se serait jeté en pleurant à l'encolure de l'animal. Ainsi entrait-il,  le 3 janvier 1889, dans la phase finale de sa maladie. Cinq jours plus tard il se prenait pour Napoléon. Il ne devait plus écrire une ligne.

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J'ai trouvé par hasard, en travaillant sur un tout autre sujet, une influence étonnante de la description de Bayle dans les écrits d'un bolchevique, Nicolai Bouckharine, au chapitre de La théorie du matérialisme historique prétendant démontrer l'absence de libre-arbitre : je cite : "Voici encore la description d'une crise de paralysie progressive (conséquence de la syphilis) ; d'abord désordre psychique, légèreté d'esprit, cynisme, manque absolu de méfiance ; en deuxième lieu, le délire (folie des grandeurs, le malade croit qu'il est milliardaire, qu'il est roi) ; la troisième phase : abattement général (P. Rosenbach : La paralysie progressive). Suivant les parties du cerveau qui sont atteintes, la direction de la volonté se modifie. Toute la pratique médicale, en ce qui concerne les maladies nerveuses, est basée sur les rapports entre la vie psychique et certaines causes déterminées." Nicolai Bouckharine, anti-stalinien, sera exécuté lors des procès de Moscou en 1938.

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    Il semble bien que nous devions à Morel-Lavallée, auteur de Syphilis et paralysie générale paru en 1889, l'inversion de la défiance, très hexagonale comme nous le verrons. Dans son introduction, il écrit " la folie syphilitique n'a pas encore droit de cité dans la pathologie offficielle..., elle n'est au plus que tolérée à titre conjectural, hypothétique ; elle est fortement tenue en suspicion sinon reniée par la plupart de nos classiques..., elle est considérée comme une hypothèse fortement entâchée d'hérésie." Comble, Morel-Lavallée est un élève d'Alfred Fournier, et lui demande nonobstant le sacrilège qu'il s'apprête à commettre de rédiger la préface de son ouvrage ! Ce que le Maître accepte avec fair-play et dans un style qui fait passer toute condescendance et toute réserve : " On était si tranquille - au moins chez nous - dans le domaine de la paralysie générale. Personne, notamment, ne songeait à en troubler l'obscure étiologie, lorsqu'il vous a plu d'y introduire la syphilis, indiscrète personne bien connue pour ses tendances aux plus illégitimes empiètements." Au moins chez nous : allusion au processus en marche qui reconnaît ailleurs en Europe l'origine syphilitique de la paralysie générale.

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En Allemagne, Friedrich Esmach et W. Jessen (1857) : la syphilis est toujours et invariablement le point de départ de la paralysie générale des aliénés. La Thèse d’Hildenbrandt en 1859 identifie chlorose syphilitique, atteinte du crâne, des méninges, du cerveau. Le stambouliote Demetrius Zambaco écrit en 1862 : « la syphilis du cerveau peut déterminer une paralysie générale du mouvement, avec une aliénation même de l’intelligence, paralysie ressemblant à s’y méprendre à la folie paralytique ». Noguchi (1876-1928) et Moore, isolant le tréponème pâle du cerveau  de patients atteints de paralysie générale en 1913, mettront fin au débat.

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    Pour quelle raison en France au XIXè siècle exista-t-il une telle résistance à admettre l’origine syphilitique de la paralysie générale ? En 1879, Auguste Voisin, dans son Traité de la paralysie générale des aliénés, écrivait : " l'intérêt qui s'attache à l'étude de la paralysie générale s'explique, lorsqu'on assiste à l'extension de cette affection redoutable ; sans l'appeler la maladie du siècle, il faut reconnaître l'influence des bouleversements sociaux et des révolutions sur le développement de cet état morbide, la participation plus spéciale des causes morales dépressives à cet accroissement." Nous retrouvons l'écho des propos d'Esquirol, et pour ceux de ma génération, de chansons entendues il y a quarante annnées : le schizophrène symptôme d'une société malade pour Deleuze et Gattari, le fou malade de la société pour les anti-psychiatres, Laing et Cooper jusqu'au cinéaste Ken Loach. Curieusement muets sur le traitement psychiatrique des prisonniers politiques des pays de l'Est. Je dois pour tenter de répondre à cette question de la résistance à reconnaître la place de la syphilis dans la paralysie générale faire un détour par les causes de l'aliénation. Comme il est tard, que vos cerveaux sont fatigués par ce que vos bons maîtres y ont semé tout au long de cette journée laborieuse, je vais vous distraire avec deux tableaux.

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    Le premier est un petit format de Francisco Goya, Corral de Locos, exécuté en 1794, et exposé au Meadows Museum de Dallas. Ces fous entassés dans une cour délimitée par de hauts murs, sont frappés par la lumière éblouissante d'un soleil que l'on devine au zénith. Ils sont situés exactement au dessus de leurs ombres.  La seule ouverture est infranchissable, munie de barreaux. Certains crient, se battent, lèvent les bras, regardent le spectateur. Cette oeuvre a été réalisée peu de temps après que Goya fusse frappé par un mal étrange : il devint sourd, eût semble-t-il des hallucinations. Et changea de manière, surtout de thématique, laquelle devint obscure, tragique, terrifiante, illustration de délires et de cauchemars. Vous connaissez tous le Caprice intitulé : le sommeil de la raison engendre des monstres.

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    Passons maitenant à cette oeuvre de Télémaco Signorini, intitulée La sala delle agitate al San Bonifazio in Firenze, réalisée trois quarts de siècle plus tard, et exposée à la Galleria d'arte moderna di Ca'Pesaro, à Venise. Même thème, exactement même construction - il me paraît impensable que Signorini n'ait pas eu connaissance de l'oeuvre de Goya. Mais la lumière ne tombe plus, écrasante et transcendante, du ciel ; les aliénés sont protégés par un plafond, la lumière émane de la droite, qu'une patiente ne crains plus de regarder, tandis que les ombres s'étalent désormais à côté des personnages. De l'influence, certes tardive, des Lumières dont Pinel fut l'héritier direct. Revenons à notre sujet.

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Causes de l’aliénation
   
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    Chez nos collègues germaniques, à la fin du XVIIIè siècle, on pèse les cerveaux avec Meckel, qui constate en 1764 un déssèchement chez les aliénés, tandis que Greding observera une inflammation des enveloppes du cerveau. Rappelez vous les conclusions de Bayle. Et en France ? Pour Pinel, en 1801, l'estomac et les intestins sont en cause. Plus précisément les passions telles que la joie, la colère, la peur et la tristesse, affectent la circulation, la respiration et les fonctions gastro-intestinales qui, en retour, par un processus d'influence sympathique, affectent le fonctionnement du cerveau. Esquirol en 1805, ne dira pas autre chose de l'altération des forces vitales du cerveau. Pierre-Antoine Prost, dans son coup d'oeil physiologique sur la folie, incrimine la bile en 1807, comme le légiste Fodéré le sang en 1813. Pour Broussais, la gastrite chronique est responsable en 1828. Pour Georget, le médecin de Géricault, ce sont les influences morales qui sont déterminantes d'une atteinte idiopathique (et non sympathique, car alors, comment prétendre agir sur la maladie en corrigeant le symptôme ?). Dans tous les cas, chez nous, les lésions cérébrales sont l’effet et non la cause de l’aliénation. Autrement tourné, l'aliénation provoque les lésions cérébrales. Certes vous n'êtes pas habitué à raisonner dans ce sens. Le travail de Bayle prend cette assertion à rebours, et affirme que les lésions des méninges sont la cause de la démence. Vous trouvez naturelle, logique, la position de Bayle, pour qui la majorité des maladies mentales sont le symptôme d'une inflammation primaire chronique des membranes du cerveau.

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    Comment situer Bayle dans la délimitation progressive du vital et de l'organique, problématique qui occupe tout le XIXè siècle ?  Il faut comprendre l'évolution rapide des idées dans le vacarme de la fin du XVIIIè siècle et l'Europe mise à feu et à sang par Napoléon au début du XIXè siècle. Nous proposons de partir du médecin écossais William Cullen qui définit le concept de névrose en 1777 : c'est l'ensemble des perturbations du sentiment ou du mouvement sans lésion des organes mais en rapport avec une affection du système nerveux.  Nous avons vu les conceptions de Philippe Pinel (1745-1826) développées dans la Nosographie philosophique, ou la méthode de l'analyse appliquée à la médecine (1798) et dans le Traité médico-philosophique sur l'aliénation mentale ou La manie (1801). Pour le fondateur de l'anatomie pathologique, élève et collaborateur de l'oncle d'Antoine Laurent Bayle, René-Théophile-Marie-Hyacinthe Laënnec (1781-1826), auteur du Traité inédit sur l'anatomie pathologique, ou Exposition des altérations visibles qu'éprouve le corps humain dans l'état de maladie (1812), et qui le premier définit la cirrhose hépatique, il faut distinguer les maladies organiques, avec lésion d'un ou plusieurs organes, et les maladies nerveuses qui ne comportent aucune altération constante d’aucune partie du corps. Étienne Jean Georget  (1795-1828) prend soin d'opposer les délires aigus : associés à des troubles moteurs et des convulsions, consécutifs à des affections cérébrales, évoluant vers la mort ou la guérison complète ; des délires chroniques : troubles intellectuels et affectifs, consécutifs à des causes morales, évoluant vers la chronicité ou l'incurabilité, correspondant à l'ensemble de la pathologie mentale à laquelle sont confrontés les aliénistes. Bayle distingue lui l'organique du vital, opposant lésions organiques et désordres vitaux, altérations des propriétés vitales ou des fonctions, tout en admettant qu'ils peuvent coexister, dans la phtysie par exemple. Peu après Jean Cruveilhier (1791-1874) dans ses Cours d'études anatomiques (Paris, 1830) propose une classification en quatre rubriques : lésions organiques, simples et mécaniques ; lésions primitivement organiques et secondairement vitales ( hémorragies ) ; affections primitivement vitales doublées de lésions organiques  soit profondes soit superficielles. Enfin maladies vitales sans aucune lésion (névroses et fièvres)5.

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    Plus précisément, examinons ce qui oppose ces deux auteurs dont nous parlons depuis le début de cet exposé : d'un côté Étienne Jean Georget  (1795-1828), de l'autre Antoine Laurent Jessé Bayle (1799-1858). Ils publient leurs premiers travaux quasi-simultanément. Georget juge très sévèrement son collègue : la Nouvelle doctrine des maladies mentales est six fois trop longue et sa lecture d'un ennui mortel.  Georget influence nous l'avons vu par Gall et Lavater est l'élève de Pinel et d'Esquirol. Pinel est le traducteur français de l'écossais Cullen. De l'autre côté, Antoine Bayle renvoie aux conceptions de Johann Ernst Greding dont j'ignore s'il a lu les oeuvres réunies quinze ans après la mort de ce dernier, en 1790, et éditées en allemand. L'influence capitale, est celle de Xavier Bichat (1771-1802) auteur en 1800 du Traité des membranes, et la même année des Recherches Physiologiques sur la vie et la mort. Il fonde la société médicale d'émulation, pépinière de l'anatomo-pathologie française. Gaspard Laurent Bayle est l'un de ses élèves, qui formera à son tour Laënnec : ils découvriront ensemble les altérations anatomiques de la tuberculose - bien avant que les concepts de germe ou de cellule, ait remplacé ou complété les notions de tissu et d'inflammation. Laënnec et Gaspard Bayle formeront à leur tour Antoine Bayle, dont le protecteur Royer-Collard meurt en 1825. Deux écoles coexistent, l'une affirmant la primauté de la physiologie ( la physiologie doit précéder l'anatomie, dixit ) ; l'autre la primauté de l'examen anatomique.

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    Déplaçons l'examen des personnes  au concept : quel est le statut de la monomanie, selon que l'on est physiologiste ou anatomiste ? La collusion est claire entre Esquirol et Georget, lequel insiste pour dégager la monomanie de la paralysie, afin de conserver le statut de monomanie maladie, et de maintenir la pause de son maître affichée dans Les passions considérées comme cause, symptôme, et moyen de la maladie mentale. 1805. Rappelons qu'il ne s'agit pas moins que de fonder une thérie justifiant la pratique de thérapies agissant sur les passions considérées non seulementn comme cause et symptôme, mais aussi comme moyen de correction de ce dernier et donc de guérison de l'aliénation. Tandis que Bayle se situe aux antipodes de cette conception : en même temps qu'il affirme que les lésions des enveloppes du cerveau - membranes qu'il a vu atteintes à travers les prescriptions de Bichat, de Laënnec et de son oncle Gaspard - sont caractéristiques de la paralysie générale, il maintient que la monomanie en est le symptôme, la conséquence. Agir sur le symptôme ne modifiera pas l'état des méninges. À la mort de Royer-Collard, Bayle a 26 ans, tous ses Maîtres et appuis ont disparu, il se retrouve seul face au cercle d'Esquirol. Les enjeux idéologiques sont considérables, le statut d'un nombre croissant d'aliénistes est en jeu, et Bayle sera balayé, lui, sa carrière et ses idées fantasques. On n'entendra plus la voix de l'inventeur de la paralysie générale.

Question naïve

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    Nous nous trouvons devant une situation que nous ne savons pas penser : comment un germe, Treponema pallidum pallidum, peut-il provoquer une forme de délire si spécifique ? On rappellera que la maladie n’est pas le germe, mais un ensemble de phénomènes consécutifs à sa présence dans l’organisme ( Claude Bernard : le virus n'est rien, le terrain est tout ). Ce qui déplace le problème : comment un ensemble de phénomènes consécutifs à la présence d’un germe peut-il se manifester si spécifiquement ?

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De  l'utilisation du principe de causalité dans la définition du lien entre lésion et symptôme, et dans la constitution des entités morbides.

    La différence de statut de la monomanie chez Georget et Bayle, maladie chez le premier, symptôme chez le second, permet d'entrevoir lorsqu'on la place dans la perspective de l'opposition idéologique entre physiologistes et anatomistes, ce qui différencie fondamentalement les deux courants de pensée. Chez les physiologistes, est déterminante, l'action sur la maladie : ce sont des thérapeuthes, qui construisent un modèle de maladie, une définition de ce qu'est une maladie, où l'action qu'ils envisagent, laquelle n'est rien moins que la modification d'un état d'aliénation, ne se justifie qu'au prix d'un coup de force rhétorique : le théoricien est Esquirol, qui propose un modèle morbide inédit : une maladie qui est à la fois cause, symptôme, et moyen d'action sur elle-même dès lors qu'elle est son propre symptôme. Cette affirmation vertigineuse repose sur une utilisation particulière du principe de causalité, au service du principe de finalité. J'ai un instant pensé que la classification des monomanies par Esquirol était platonicienne : intellectuelle, affective, instinctive, l'on retrouve la conception tripartite de l'âme, noûs, thumos et epithumia, l'intellect, le coeur et l'appétit. Puis j'y ai trouvé de l'aritotélisme : le postulat (ce que nous devons admettre sans rechigner si nous voulons poursuivre) est ici la finalité, la raison d'être du système d'Esquirol : justifier l'action du thérapeute. Et au bout du compte, le développement d'un corps de métier qui prétend guérir les fous, ce qui n'est pas rien dans la première moitié du XIXè siècle. Le postulat est la cause finale : il est possible d'agir sur la folie, de la corriger, de l'anéantir. Voilà pour la cause finale. Il nous en reste trois, si nous suivons toujours Aristote : la cause matérielle, l'inconnaissable, est unie chez le stagirite à la cause formelle, ce qui permet de définir toute chose. Ici, l'identité proclamée de la maladie et de ses symptômes, de la cause matérielle et de la cause formelle, résout le risque d'inintelligibilité. Enfin, la cause efficiente, ce qui est responsable du mouvement même de la maladie, Esquirol l'identifie de manière explicite : les monomanies sont le miroir de l'état moral d'une civilisation. Les causes morales à l'oeuvre dans la société provoquent l'apparition de monomanies.Voilà pour la cause motrice, la cause efficiente.

    Cette démonstration, que la logique qui anime l'équation de Pinel-Esquirol - si l'on peut classer les maladies mentales à partir de leurs symptômes, on peut les corriger en annulant les symptômes par une méthode morale - est archaïque, enracinée dans leurs humanités, vous a paru compliquée, voire fumeuse. Vous pensez que je divague ? Relisez Esquirol, Des maladies mentales considérées sous le rapport médical, hygiénique, et médico-légal. Du côté de Bayle c'est beaucoup plus simple : vous ne trouverez pas un indice, dans les trois ouvrages qu'il écrivit avant sa disgrâce, d'un lien de causalité entre l'atteinte des enveloppes du cerveau, qui relève de la théorie des membranes de Bichat ; et la description des symptômes de la paralysie générale, qui est organisée comme la plupart des observations cliniques du temps, phase de début, phase d'état, phase ultime, en distinguant à chaque phase les symptômes physiques et les symptômes psychiques selon le dualisme classique des signes du corps et des signes de l'esprit. La logique de la causalité n'a aucune nécessité, voire aucune place, dans l'oeuvre de Bayle, qui n'est qu'une exposition dans deux registres différents, celui du symptôme et celui de l'anatomie, établissant une corrélation, sans que se posent les questions du pourquoi ni du comment. L'équation de Pinel et d'Esquirol - si l'on peut classer les maladies mentales à partir de leurs symptômes, on peut les corriger en annulant les symptômes par une méthode morale - n'a de sens que si l'on admet que les symptômes créent la maladie. ( rappelez-vous encore une fois  les lésions cérébrales sont l’effet et non la cause de l’aliénation). La remise en question de cette affirmation par Bayle menaçait tout un édifice à la fois idéologique et institutionnel, à commencer par la justification de l'existence d'un certain type de praticiens. Voilà la raison pour laquelle, lorsque son maître et protecteur Royer-Collard disparut en 1825, Bayle fut totalement marginalisé en particulier par le cercle des partisans d'Esquirol, alors même que Georget mourut très jeune en 1828.

Conclusion

    Vous me direz pourquoi s'occuper des fantômes, de maladies quasiment disparues, d'une antiquité qui n'intéresse plus personne ? Pas seulement parce qu'elle resurgit, nouvellement décrite dans une circonstance que vous connaissez mieux que moi, associée au VIH. Pas seulement parce qu'elle existe encore dans des pays dont le développement sanitaire n'est peut-être pas comparable au nôtre mais dont les capacités diagnostiques ont largement progressé. Mais cette maladie, qui fut si fréquente, et même aussi intimement liée à la vie de notre société, à son idéologie, à sa culture, jouait alors un rôle comparable à celui du Sida actuellement, et offre une singularité symptomatique qui m'a paru l'occasion de traiter d'une question plus vaste que la simple évocation d'une ancienne gloire médicale : comment un agent infectieux peut-il provoquer une modification telle que la présentation psychique soit toujours la même, stéréotypée comme l'éruption du zona ou la crise de goutte ? Et plus profondément, comment a-t-on pensé le lien, dans une pathologie neuropsychiâtrique, entre la lésion et le symptôme ? Mais auparavant, il me fallait me convaincre, et vous convaincre, que cette singularité si remarquable était bien réelle, et ne relevait pas de la légende.

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    Avant de nous replonger une dernière fois dans l'iconographie de la syphilis, je ne voudrais pas manquer de rappeler, ce que beaucoup parmi vous savent déjà, l'opinion du grand médecin anglais Sir William Osler  (1849-1819) qui affirmait que connaître la syphilis, c'était connaître la médecine. La grande imitatrice, c'est ainsi qu'il la surnommait - the great imitator. La citation exacte d'Osler est : “I often tell my students that it is the only disease which they require to study thoroughly. Know syphilis in all its manifestations and reactions, and all things clinical will be added unto you ". Il est vrai, qu'en ne considérant déjà que la liste des manifestations neurologiques, l'on couvre déjà une très large partie de la symptomatologie neurologique.

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Iconographie (Syphilo-iconographie)

Matthias Grünewald

    Matthias Grünewald (c.1475-1528) Retable d’Issenheim c. 1515 Oil on wood, 265 x 141 cm Musée d'Unterlinden, Colmar.

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"Nous en devons la connaissance à notre ami le docteur Keller, qui a eu l'obligeance d'en faire faire pour nous une copie et a bien voulu nous remettre la note suivante, à laquelle nous ne trouvons rien à ajouter".


J-M Charcot et Paul Richer, des difformes et les malades dans l’art

Arcimboldo

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    Connaissez vous ce portrait anamorphique d'Arcimboldo, peint à la demande de l'empereur Maximilien de Habsbourg, représentant un juriste, très vraisemblablement Johann Ulrich Zasius vice-chancelier de l'empereur, administrateur des finances de la famille impériale ? Zasius était défiguré et par la syphilis et par un accident de carosse. Le financier devint la risée de la cour.


Bronzino

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Bronzino,1540-50 Allégorie avec Vénus et Cupidon Huile sur toile, 146.5 x 116.8 cm. National Gallery, Londres

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Rembrandt

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Rembrandt van Rijn Portrait de Gérard de Lairesse le poussin hollandais devient aveugle, dicte des cours

Hogarth


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Date de création : 20/06/2010 : 10:21
Dernière modification : 25/06/2010 : 23:22
Catégorie : Conférences
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